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Espace-Forum des Enseignants-chercheurs algériens
9 novembre 2017

Doctorat, vers la dilution du diplôme ?

Tahar Hadjar a pris la défense, ce 2 novembre devant la presse, d’une étudiante, fille du recteur de l’université de Ouargla, accusée d’être parachutée sur la liste des accédants au troisième cycle d’enseignement supérieur : le doctorat.

Du haut de son statut de ministre de la République, il répond, par une formule dédaigneuse : «Les enfants de responsables peuvent aussi mériter leur réussite», à une problématique pourtant endémique à l’université algérienne, où passe-droit, népotisme, clientélisme et corruption ont aussi leurs places «pédagogiques».

Cette année particulièrement, le nombre de cas de dénonciations concernant le parachutage de certains «enfants de responsables» de différents rangs et statuts, pose réellement des interrogations sur la pertinence et le sérieux des concours organisés par le secteur de l’enseignement supérieur. Ces forfaitures, loin d’être des cas isolés, sont autant de coup de boutoir donnés à la crédibilité de ces concours.

D’ailleurs, et ce qui est très étonnant, il n’est pas rare de voir figurer sur les listes des lauréats dont la moyenne générale flirte avec les 5/20. Une aberration lorsque le cursus convoité est le troisième cycle de l’enseignement supérieur, soit le doctorat qui, doit-on le rappeler, est un palier de recherche scientifique !

Tahar Hadjar, qui annonçait l’été passé sa détermination à protéger et valoriser ce diplôme en particulier, vient, ces dernières semaines, de donner le coup de grâce qui va sûrement diluer et amollir le doctorat. Un nouveau décret, concocté par le ministère de l’Enseignement supérieur, va dispenser l’étudiant de 3e cycle de la publication de son travail de recherche dans une revue scientifique internationale.

Aujourd’hui, on comprend mieux ce que voulait dire Tahar Hadjar par algérianiser le LMD : c’est rompre avec ce qui se fait ailleurs dans le monde au profit de la gestion des flux et de la dilution des diplômes du supérieur. Car, même si elle a été saluée dans certains cercles adeptes du nivellement par le bas, la décision de l’équipe Hadjar est un coup porté à la crédibilité et à la pertinence de ce diplôme.

C’est un cache-misère et une fuite en avant pour masquer le cancer du plagiat qui a métastasé et placé l’université algérienne non pas dans les classements internationaux, mais dans un état terminal de déliquescence. Par ailleurs, au lieu de penser à booster l’étudiant vers l’avant, en direction de l’excellence ou à défaut de produire des publications scientifiques algériennes de qualité, le ministre prend la tangente.

Radical. Ce n’est pas parce qu’il y a 4000 morts chaque année à cause des accidents de la route qu’il faut supprimer le permis de conduire ! Par projection donc, ce n’est pas parce que le plagiat fait des ravages, que le nombre de doctorants incapables (pour une raison objective ou pas) de soutenir dans les temps ou de publier son travail dans une revue internationale, qu’il faille supprimer la «formalité».

Rappelons à toutes fins utiles, que si les universités algériennes ne figurent pas dans de bonnes positions dans les classements mondiaux, c’est, entre autres, à cause de leur pauvreté en matière de publications scientifiques.

Avec cette nouvelle mesure adoptée pour le secteur de l’enseignement supérieur, les rares établissements algériens qui figurent en queue de classement, à l’instar de celle de Sidi Bel Abbès 1781e, Ouargla 1798e et Tlemcen 2297e (dans l’édition 2015 du palmarès QS des universités mondiales) disparaîtrons tout bonnement de l’univers universitaire.

La décision de supprimer l’obligation de publication des recherches des doctorant peut être perçue comme une nouvelle brèche ouverte en faveur du «trafic» des diplômes. L’hypercentralisation des décisions au niveau du ministère – il suffit de prendre cas de l’opération de transfert des étudiants chapeautée uniquement par la tutelle et qui crée une véritable crise au niveau des établissements du supérieur – permet tous les excès. Ainsi, l’«enfant du responsable», qui a eu accès illégitimement aux études doctorales, n’aura même pas à fournir l’effort de produire un travail scientifique.

Cela va aboutir indéniablement vers un marchandage encore plus odieux que celui qui a cours aujourd’hui dans les établissements supérieurs.

Pire, ces «douctour» gagneront en grade et franchiront par les mêmes procédés les paliers de l’excellence universitaire. Ils seront ainsi des professeurs et des cadres de la nation sur titre mais sans le bagage qui va avec. Et au final, l’Algérie aura gagné un nombre impressionnant de docteurs sans recherche.

En 2015, sur un total de 30 000 étudiants doctorants, seuls 4000 activaient dans les laboratoires de recherche ! Et en termes de centralisation, ajoutons également le monopole d’accès aux sites et revues scientifiques détenu par la direction générale de la recherche scientifique qui voit à sa tête Abdelhafidh Aourag, le champion d’Algérie des publications scientifiques. C’est par-là qu’il faut commencer. Assainir d’abord les rouages de la recherche avant d’éliminer carrément les publications dans les cursus universitaires.

Samir Azzoug  (El Watan, 08 Novembre 2017)
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Commentaires
D
Malheureusement les dits professeurs ou proprement dit, ces directeurs de thèse sont souvent préoccupés par leurs propres intérêts!
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S
Bonsoir,<br /> <br /> Il faut créer une association qui peut porter le nom "Asssociation des Doctorants Lésés". Après plus de 15 ans, j'arrive pas à soutenir mon Doctorat, parce que l'université où je suis inscrit demande du Thomson-Reuters. Mes anciens étudiants, sont maintenant MCB/MCA!! Ils étaient intelligents de faire leurs inscriptions à l'université de Biskra, qui ne demande qu'une publication "LOCALE" pour autoriser la soutenance!! J’ai même des collègues enseignants qui ont transféré leurs dossiers de leurs universités d’origine vers Biskra. Résultat ; ils ont soutenu leur Doctorat !<br /> <br /> Pourquoi ?? Et pourtant le Docteur de Biskra va percevoir le même salaire que le docteur de l'USTHB, et il va devenir MCA, MCB et Prof avec les mêmes critères, que son homologue de l'USTHB! Si le Doct de Biskra fait demain un transfert, vers l'USTHB, on ne peut pas lui dire qu'il n'est pas Docteur, MCB, MCA ou Prof, par ce que son Doctorat est de nationalité Biskria. C'est toujours le même ministère et c'est toujours l'Algérie. Je ne pense pas que l’USTHB soit Cambridge , Oxford, ou à la limite MIT ! pour demander du Thomson-Reuters alors que d’autres universités, à l’image de Biskra, font tout pour faciliter la soutenance de ses doctorants. Chapeau bas et fleurs avec pour Mr le Recteur de Biskra.<br /> <br /> J'aimerai poser un autre immense problème qui est le suivant: Pendant les 10 dernières années, j'ai fait 3 projets CNEPRU et 1 PNR. Il est clair que lesdits projets ont étés élaborés pour résoudre des problèmes qui rentraient dans les sujets de Master, Magister et/ou Doctorat. Encore, et surtout pour les PNR, ses thèmes reflétaient des problèmes nationaux, Algériens, et dans le cadre des doctorats on essayait de trouver des solutions, ou au moins, avancer.<br /> <br /> Comment se fait qu'en traitant des problèmes nationaux, Algériens, on arrive à publier dans Thomson, qui à chaque fois nous rejette l'article parce que le travail fourni n'a pas de portée internationale? On ne pourra jamais publier avec cette condition de "l'universalité du travail" car nous avons traité des problèmes algériens !!! Donc, qui doit endosser les rejets des journaux? Ce n’est surtout pas les doctorants, mais c’est certain qu’ils seront les perdants.<br /> <br /> Normalement, le Directeur de thèse, généralement, Professeur, doit être au courant de tout ce qui touche la phase doctorale de ses doctorants (les labos récepteurs, les noms des journaux qui travaillent sur les sujets proposés, le type de travaux acceptés par tel ou tel journal, ...). Le Directeur de Thèse est RESPONSABLE de ses doctorants. Il doit rendre des comptes !! S’il a des doctorants de plus de 10 ans d’inscription, qui ont fourni des travaux, et continuent de le faire, mais à chaque tentative des rejets de la part des journaux, il doit les aider pour soutenir leurs thèse, en proposant, par exemple, des commissions internes ou ministérielles. Tout le monde va lui faire confiance, quand il dira que tel ou tel doctorant mérite la soutenance de sa thèse (preuve à l’appui de toutes les tentatives vis-à-vis des jouranux)<br /> <br /> SVP, arrêter de parler des faux problèmes!! Tous led doctorants doivent avoir la même chance ;<br /> <br /> "Thomson Pour Tous - Biskra Pour Tous"<br /> <br /> <br /> <br /> Salutations.
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M
BRAVO POUR CET ARTICLE
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E
Bonsoir,<br /> <br /> <br /> <br /> Merci Chak pour votre excellente et constructive contribution. Vu sa qualité, nous vous demandons l'autorisation de lui donner un statut de message.<br /> <br /> A cet effet, je vous demandez de complétez le point "5". Merci.<br /> <br /> Cordialement
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C
La question de suppression de la publication des travaux de recherches des doctorants mérite un débat profond entre les concernés par l’encadrement en premier lieu et ne doit pas être décidée par le ministère. Si on veut résoudre le problème de retard dans les soutenances des thèses de doctorat, il faut ouvrir le débat sur les causes réelles et non chercher les solutions faciles qui se répercutent sur le niveau de nos diplômés …<br /> <br /> A mon avis, même si la publication des travaux d’une thèse n’est pas obligatoire dans toutes les universités du monde et notamment dans les universités respectées … Chez nous, l’obligation de publier au moins un article dans une revue de renommée internationale avant la soutenance est une nécessité pour plusieurs raisons, qui sont, entre autres :<br /> <br /> 1) Augmenter la visibilité de nos universités : Si chaque doctorant publie un article en quatre ans de formation doctorale, nos universités gagneront dans l’échelle de classement internationale et occuperont des rangs honorables dans très peu de temps. <br /> <br /> 2) Créer une dynamique de compétition : Pour inciter les doctorants à donner de leur mieux, il faut créer une dynamique de compétition entre eux et la publication des résultats de recherche dans des revues reconnues pour leur sérieux à travers leurs « facteurs d’impact » est le meilleur moyen. <br /> <br /> 3) Produire des travaux de recherche de qualité : L’obligation de publier dans une revue respectable incite le doctorant et le directeur de recherche à travailler sur des sujets d’actualité, d’intérêt sûr et reconnu. Par ailleurs, ceci évite certainement le recours au plagiat des travaux d’autrui, qui est une pratique courante par certains doctorants et malheureusement par quelques enseignants (Professeurs y compris), qui prend de l’ampleur chaque jour.<br /> <br /> 4) ...<br /> <br /> <br /> <br /> Cependant, pour que les points énumérés ci-dessus, et autres, soient réalisables, il faut donner les moyens conséquents aux doctorants et aux enseignants. Je cite entre autres ce qui suit :<br /> <br /> 1) Donner une formation de qualité à nos étudiants dans le premier et second cycle. Pour cela, il faut tout d’abord appliquer le système LMD comme il se doit ou l’abandonner et revenir au système classique, faute de moyens conséquents. L’application du système LMD, commence par l’orientation des bacheliers selon leurs compétences et leurs désirs. Par exemple, un bachelier qui a juste 10 de moyenne au bac, ne devrait pas suivre une formation en sciences de la matière ou sciences techniques et notamment s’il n’a pas envie de cette branche. Par ailleurs, en License, les étudiants ne reçoivent pas une formation conséquente comme le stipule le système. Par exemple, le Tutorat est abandonné ; les devoirs (Home Works) ne sont pas appliqués, … <br /> <br /> 2) Sélectionner les étudiants compétents, capables de suivre une formation doctorale et produire une thèse conséquente. On voit que des doctorants réussissent le concours d’entrée en doctorat avec des moyennes très faibles, car le niveau des concourants est médiocre (la faute ne leurs revient pas toujours mais en général à la mauvaise formation qu’ils ont eu). Ceci dit, il ne faut pas juste considérer le classement dans le concours pour désigner les reçus, mais il faut au préalable avoir une moyenne du concours supérieure ou égale à 10. C’est une des garanties que les reçus ont une bonne formation qui leur permet d’aborder le troisième cycle avec aisance et qu’ils pourront faire une recherche de qualité et terminer leur cycle dans les meilleurs délais.<br /> <br /> 3) Donner les moyens nécessaires aux doctorants pour bien réussir. Le doctorant a besoin d’un bureau équipé et un accès facile aux ressources nécessaires : documentation, internet, stages si nécessaire etc. Par ailleurs, il doit s’occuper uniquement de son travail de thèse et pour cela, il faut qu’il soit à son bureau ou laboratoire durant toute la semaine. Pour cela, il lui faut une bourse conséquente qui ne l’oblige pas à travailler en dehors de l’université. On constante que la plupart des doctorants travaillent à plein temps dans l’enseignement moyen et secondaire ou ailleurs. Comment peut-on espérer que ces doctorants, qui ne leurs reste que très peu de temps à consacrer à la recherche, qu’ils fournissent un travail de qualité, publiable dans une revue respectable.<br /> <br /> 4) Donner plus responsabilités aux encadreurs. Par exemple, un enseignant qui dirige des thèses de doctorat doit se sentir responsable de l’évolution de ses doctorants. Pour cela, son rôle ne doit pas se limiter à corriger le manuscrit final de la thèse. Il doit avoir le devoir et le droit d’évaluer objectivement l’évolution du travail de recherche de chacun de ses doctorants. Il aura le devoir de présenter, à la fin de chaque année universitaire, un rapport objectif sur l’état d’avancement réel de chaque doctorant et le droit de suspendre la bourse à ceux qui n’étaient pas sérieux et même de les exclure. <br /> <br /> 5) ...
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